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LES BRYOPHYTES
On rassemble sous le nom de Bryophytes ou Bryopsida ou, plus communément, Muscinées, plus de 25 000 espèces végétales (Anthocérotales, Hépatiques, Mousses et Sphaignes), toutes chlorophylliennes, vivant sur le sol, sur l'humus des forêts, sur d'autres végétaux, parfois dans l'eau douce, très rarement dans l'eau saumâtre. Leurs caractères morphologiques et anatomiques, leurs exigences écologiques diffèrent suivant les groupes, mais toutes les espèces appartenant à cet embranchement présentent le même cycle vital.
Bryophytes : cycle vital
Il résume les stades successifs du développement, indique la limite des deux phases (gamétophytes à n chromosomes, sporophytes à 2n chromosomes) et le moment des deux opérations capitales (fécondation et méiose).
Bryophytes : organes reproducteurs
Chaque plante possède deux parties morphologiquement très distinctes. L'une, feuillée ou thalloïde, dont les noyaux cellulaires ont n chromosomes, produit et porte les éléments reproducteurs ou gamètes : c'est le gamétophyte. L'autre, fixée au gamétophyte, possédant des noyaux à 2 n chromosomes, produit et porte les spores : c'est le sporophyte.
Le cycle vital des Bryophytes comprend donc deux phases successives (alternance de phases ou de générations). L'une correspond au sporophyte ; l'autre, la phase dominante, correspond toujours au gamétophyte.
Il y a plus de deux cents ans, on ne savait pas encore comment interpréter la constitution des Muscinées. P. A. Micheli, vers 1729, désignait les « chapeaux » des Marchantia par l'expression « flos monopetalus ». Dillenius, en 1741, assimilait la capsule des Mousses à une étamine, les spores à du pollen. Schmidel (1747) considérait le sporogone et les spores comme équivalents aux fruits et aux graines des plantes supérieures. C'est seulement vers la fin du XVIIIe siècle qu'Edwig découvrit les organes producteurs des gamètes (anthéridies et archégones), qu'il assimilait d'ailleurs aux étamines et aux pistils des Phanérogames. À Hofmeister revient la découverte, en 1851, de l'alternance de générations chez les Bryophytes.
Le terme « Bryophytes », créé par A. Braun en 1864, avait alors un sens très vaste. Il a été compris à peu près dans son sens actuel par W. P. Schimper en 1879.
Morphologie et biologie
Cycle de développement
Le gamétophyte
Cette phase du développement commence dès la formation de la spore et se termine au moment où va s'effectuer la fécondation de la cellule œuf.
La spore
Dans une capsule, les spores se trouvent parfois réunies en petit nombre (20 seulement chez Archidium alternifolium ; 200 à 300 chez les Riccia), le plus souvent en nombre beaucoup plus grand (on en a compté 20 000 dans une capsule d'Orthotrichum affine).
Généralement unicellulaires, rarement pluricellulaires, elles sont sphériques ou un peu ovoïdes ou tétraédriques, très pâles ou teintées de jaune, de brun rouge, parfois de noir ou même de violet. Leur diamètre varie de 7 à 10 μm chez les Polytrichum, de 100 à 200 μm chez beaucoup de Marchantiales et atteint même 250 μm chez Dicnemon et Synodontia. Leur enveloppe comprend une intine mince et une exine plus ou moins épaisse, lisse ou ornée de papilles, de verrues, d'aiguillons, d'alvéoles limités par des murets. Le cytoplasme d'une spore contient de la chlorophylle et une ou plusieurs gouttes huileuses. Le noyau possède un nombre de chromosomes, désigné par n, que l'on qualifie de nombre haploïde.
Le protonéma
L'enveloppe de la spore, au moment de la germination, se déchire irrégulièrement. La masse cytoplasmique apparaît à l'extérieur et devient soit un filament simple ou ramifié, chlorophyllien, composé de cellules haploïdes séparées par des cloisons obliques ou perpendiculaires à la direction du filament, soit une lame chlorophyllienne lobée ou ramifiée. Ainsi se forme le protonéma sur lequel naissent des rhizoïdes. À partir d'une ou de plusieurs cellules se forment une ou plusieurs masses cellulaires ou bourgeons. Au sommet de chaque bourgeon s'individualise une cellule apicale généralement tétraédrique, à base distale inactive et à trois faces latérales actives, c'est-à-dire qui se cloisonnent pour former soit un thalle soit une tige feuillée. Le protonéma, parfois persistant, disparaît le plus souvent quand la tige est formée.
La tige feuillée ou le thalle
Chez les Mousses et aussi chez les Hépatiques à tige feuillée, l'axe ou « caule » ou « caulidium », nommé plus communément « tige », peut se dresser se coucher, ramper sur le substrat ou pendre. Sa longueur varie de 1-2 mm chez les Ephemerum, atteint 30 cm chez les Polytrichum, 50 cm chez Dawsonia grandis et plus encore chez les espèces accrochées aux branches des arbres. Sa structure varie beaucoup : généralement très simple chez les Hépatiques, elle devient beaucoup plus complexe chez certaines Mousses et montre alors des îlots de stéréides, cellules à parois épaisses, et des hydroïdes, cellules à parois minces conductrices d'eau. La base de la tige, dans certains cas toute la tige, possède des rhizoïdes qui fixent la plante au substrat.
Les feuilles, ou « phyllidies », se disposent sur la tige en spirale. Elles comprennent un limbe, le plus souvent unistrate, dépourvu de nervures ou muni d'une ou deux nervures simples. La structure des feuilles, comme celle de la tige, varie suivant les groupes.
Chez les Hépatiques à thalle, le thalle, dont la longueur peut atteindre 10 cm, est charnu, ramifié, à symétrie dorsi-ventrale, plus épais le long de la région médiane et dépourvu de feuilles ; il peut avoir une structure assez complexe (Marchantia, fégatelle) ou très simple (Riccia).
Les organes reproducteurs se forment soit au sommet d'une tige ou d'un rameau, soit sur la tige ou le rameau. Chez les espèces thalloïdes, ils sont souvent enfoncés dans le thalle ou disposés sur un plateau au sommet d'un pédoncule.
La fécondation de l'oosphère par l'anthérozoïde engendre un œuf ou zygote qui appartient déjà au sporophyte.
Le sporophyte
Le zygote devient un embryon. Il se divise en deux régions, l'une hypobasale qui donnera l'insertion du pédicelle sur le gamétophyte, c'est-à-dire le pied, l'autre épibasale qui formera le pédicelle d'une part, la capsule d'autre part.
Le sporophyte adulte comprend :
– un « pied », ou « suçoir », qui implante le sporophyte dans la tige feuillée ou dans le thalle et joue le rôle de tissu nourricier ;
– le pédicelle, ou seta, ou soie, qui conduit l'eau et les substances nutritives jusqu'à la capsule, de longueur différente suivant les espèces, presque nulle ou atteignant quelques millimètres ;
– parfois une apophyse au sommet du pédicelle, toujours formée de tissu parenchymateux et portant des stomates sur l'épiderme externe ;
– la capsule, composée d'une urne globuleuse ou cylindrique, fermée par un opercule ; l'urne contient une columelle centrale qui persiste ou se résorbe et un sac sporifère entourant la columelle.
Les cellules mères de spores se forment à partir des cellules d'une assise nommée archésporium. Elles subissent une réduction chromatique (méiose) et donnent chacune quatre spores contenant un noyau à n chromosomes.
Ce schéma général de la construction du sporophyte est valable pour un assez grand nombre d'espèces, notamment pour les Bryales, mais on note des variations importantes dans les différents groupes.
Lors de la libération des spores, la seconde phase du cycle vital s'achève.
Parfois, le cycle se simplifie et, par multiplication végétative, donc sans fécondation, un nouveau gamétophyte se forme. Cette multiplication s'effectue grâce à des propagules, petites masses généralement pluricellulaires nées sur la tige (filaments groupés en pinceau) ou au sommet de la tige, comme chez les Calypogeia, ou dans l'axe des feuilles (bulbilles), ou sur les feuilles (petits cylindres segmentés ou disques unistrates), ou même sur le protonéma ou sur les rhizoïdes. Parfois, un rameau, un fragment de feuille ou les cellules marginales des feuilles se détachent et deviennent des propagules. Il peut se former un protonéma secondaire directement sur l'un des éléments du gamétophyte, par exemple sur la coiffe, et ce protonéma sera à l'origine d'une nouvelle plante.
Absorption de l'eau
La plupart des Muscinées ont besoin d'un apport fréquent d'humidité pour maintenir leur rigidité et leur teneur en substances minérales. Hans Buch (1945) a pu distinguer : 1. des espèces « endohydres » dont les organes assimilateurs reçoivent de l'eau par un courant interne ; elles comprennent quelques espèces plus ou moins xérophiles comme Funaria hygrometrica, des mésophytes (Polytrichum attenuatum), quelques hygrophytes comme Aulacomnium palustre ; on pourrait presque les comparer à des plantes vasculaires ; 2. des espèces « ectohydres » dont les organes assimilateurs absorbent eux-mêmes l'eau et les substances minérales par leurs parois cellulaires ; la montée et même l'accumulation d'eau sont activées par des « systèmes capillaires épiorganes » comme les très fines papilles des Barbula, des « systèmes capillaires intra-organes » tels que les perforations des tissus des Sphaignes, les oreillettes de la base des feuilles, les poils hyalins, des « systèmes capillaires interorganes » établis par exemple entre la tige et la gaine foliaire, entre les éléments constituant le feutre des tiges ; 3. des espèces « mixohydres » qui, suivant les conditions extérieures, peuvent se comporter soit comme des endohydres soit comme des ectohydres ; c'est le cas de nombreuses Hépatiques feuillées vivant sur l'humus, des Muscinées croissant au bord de l'eau, tantôt submergées, tantôt sur la vase humide ou sèche.
Les phénomènes d'absorption et de mise en réserve d'eau par les Muscinées conditionnent l'existence du tapis muscinal des forêts ; ils expliquent la biologie des tourbières où Hypnacées et Sphaignes pompent sans arrêt par leur base l'eau qu'elles évaporent ensuite au-dessus de la tourbière ; ils font comprendre que, dans les régions tropicales, où l'atmosphère est saturée d'humidité, les Muscinées épiphytes comme les Lejeunéacées conservent leurs tissus gonflés d'eau.
Histologie et cytologie
Le système conducteur des Bryophytes
Chez beaucoup d'espèces (certaines Hépatiques, les Sphaignes), le tissu conducteur est très réduit : le parenchyme présente des pores ou des ponctuations fines et nombreuses qui facilitent la circulation de l'eau entre les cellules.
Dans quelques genres d'Hépatiques (Pallavicinia, Symphyogyna), le gamétophyte est parcouru par un ou plusieurs faisceaux centraux constitués de cellules à parois épaisses et ponctuées.
Chez diverses Mousses (Polytrichales et Dawsoniales, en particulier), l'axe central de la tige se compose d'un cordon central d'hydroïdes, longues cellules à parois minces et peut-être sans cytoplasme, entouré de leptoïdes, cellules allongées à cytoplasme très réduit mais pourvu de noyaux et portant, sur les parois latérales, des plages criblées comparables à celles du phloème des trachéophytes primitifs.
Les Bryophytes ne possèdent donc pas un système conducteur absolument comparable à celui des plantes vasculaires, néanmoins ils n'en sont pas complètement dépourvus. Par suite, certains auteurs ont considéré les Bryophytes comme les ancêtres des trachéophytes, d'autres pensent qu'ils sont nés des trachéophytes primitifs. On peut dire que les Muscinées dépourvues de cordon conducteur appartiennent aux groupes les plus évolués si l'on admet, comme certains bryologues, que l'ensemble des Muscinées subit une évolution réductrice.
Les tissus conducteurs des Muscinées sont considérés comme dépourvus de lignine. Des travaux récents ont montré son absence totale chez les Pallavicinia et Symphyogyna, dont le gamétophyte possède des faisceaux bien individualisés. Cependant, à la suite de certains essais de colorations, un doute s'est élevé et il semble que l'on ait montré la présence, chez quelques Bryophytes, de polymères voisins de la lignine. S. M. Siegel, en 1962, aurait réussi à faire produire de la lignine par des espèces appartenant à des genres morphologiquement très éloignés. La limite entre Bryophytes et plantes à tissus conducteurs lignifiés (trachéophytes) ne serait donc peut-être pas aussi tranchée qu'on le pensait. Toutefois, la présence de lignine chez les Bryophytes reste douteuse.
Le cytoplasme
Depuis plus de cent ans, les cytologistes s'intéressent à la cellule des Muscinées. Des progrès importants ont été réalisés à partir des années cinquante et, grâce au microscope électronique, des détails infimes ont pu enfin être observés.
Ainsi, on connaît mieux la structure des plastes, de leur système de lamelles stromatiques et granaires et leurs inclusions doubles d'amidon.
L'appareil de Golgi, observé dès 1958 dans les cellules somatiques, est connu dans l'anthéridie des Sphaignes, dans les cellules mères des spores d'Anthoceros, dans la spermatide de la fégatelle.
Les flagelles des anthérozoïdes de Sphagnum cymbifolium semblent bien constitués d'un faisceau de fibrilles longitudinales « à trajet hélicoïdal » et d'une gaine. Ils ressembleraient aux flagelles de nombreux animaux et végétaux.
Chez toutes les Muscinées, des gouttelettes lipidiques existent dans la plupart des cellules, mais seules les cellules du gamétophyte d'un certain nombre d'Hépatiques contiennent des oléocorps. Ces oléocorps sont formés d'une grosse goutte réfringente ou, plus souvent, de gouttelettes rassemblées en masse sphérique ou ovoïde, généralement incolore et mesurant quelques microns. Leur origine (probablement cytoplasmique), leur nature (huiles essentielles ou huiles grasses suivant les espèces) et leur rôle (substance de réserve ou d'excrétion) sont encore discutés.
Le noyau
Le noyau, chez les Muscinées, a été découvert par Mohl en 1839. On sait maintenant qu'il appartient au type réticulé à chromocentres.
Les chromosomes ont été comptés et décrits chez un grand nombre d'espèces appartenant particulièrement aux régions tempérées. Le premier nombre chromosomique donné pour les Hépatiques est celui de Riella clausonis (O. Kruch, 1891) et, pour les Mousses, celui de Funaria hygrometrica (R. Beer, 1903).
Pour les Hépatiques, depuis les Marchantiales jusqu'aux Jungermanniales acrogynes, on a trouvé des nombres de base égaux à 8, 9, 10, mais chez les Takakiales, plantes encore imparfaitement connues et que l'on range près des Hépatiques ou parmi elles, seulement 4 ou 5, et chez les Anthocérotales, 6.
Chez les Mousses, le nombre chromosomique est différent suivant les groupes : dans les Sphagnales, n = 19 ; dans les Andréales, n = 10 ; chez les Bryales, n = 6 (Leucobryum albidum), n = 7 (Pogonatum urnigerum), n = 10 (Hypnum cupressiforme), n = 12 (Dicranum scoparium) ou n = 26 (Tortella humilis).
La présence de chromosomes sexuels signalée par C. E. Allen en 1917 est maintenant connue chez les Hépatiques et chez les Mousses. Les chromosomes X (femelles) et Y (mâles), observés dans une même espèce à la métaphase, peuvent avoir la même taille et la même forme mais Y possède plus d'hétérochromatine que X. Cette répartition de l'hétérochromatine dans les chromosomes sexuels semble constante dans une famille donnée, au moins chez les Hépatiques.
Des chromosomes nucléolaires ont été signalés dans des familles diverses.
Écologie
Exigences écologiques
Beaucoup de Muscinées ont des exigences écologiques assez strictes. On les considère donc comme de bons indicateurs de la nature du sol et des conditions climatiques et microclimatiques.
L'humidité atmosphérique et la pluie leur sont toujours nécessaires, au moins pendant la période de germination de la spore. Certaines espèces reviviscentes, comme les Riccia, supportent de très longues périodes de sécheresse. Au contraire, les espèces épiphytes ont besoin d'une atmosphère toujours saturée d'eau. Quelques Mousses vivent submergées (Fontinalis) et même recouvertes de plusieurs mètres d'eau comme le Thamnium Lemani trouvé dans le Léman à 54 m de profondeur. Les rhéophytes supportent la violence du courant d'eau des cascades. Les Riella vivent dressés dans l'eau douce ou saumâtre. On ne connaît aucune espèce supportant l'eau de mer, cependant Grimmia maritima, fixé aux rochers maritimes, reçoit et admet les embruns et même les gouttes d'eau salée. Les Sphaignes sont plus ou moins exigeantes sur la profondeur d'eau et sur l'acidité de cette eau ; cela explique la zonation des différentes espèces autour des étangs et des lacs.
Les Bryophytes supportent des températures très élevées ou très basses, puisqu'ils vivent sous toutes les latitudes, et de la plaine à la haute montagne. Ainsi, on trouve des Fossombronia près des sources chaudes (plus de 40 0C en Islande) ; en basse Engadine, des Tortella et des Thuidium passent de − 40 0C en hiver à + 48 0C en été. P. Becquerel a montré que des Mousses résistent à l'action de l'azote liquide à − 190 0C pendant une heure, vingt-quatre heures et même sept jours.
La plupart des espèces acceptent des intensités lumineuses fortes mais certaines vivent dans des grottes, dans l'entrée à peine éclairée par la lumière du jour, ou fixées aux parois, autour de sources lumineuses artificielles.
Les facteurs édaphiques ont une grande importance dans la répartition des Muscinées ; aussi distingue-t-on des espèces terricoles, des humicoles, des psammophiles, des saxicoles, des lignicoles, des corticicoles, des épiphylles, etc.
Formes biologiques
On distingue les formes biologiques des Muscinées d'après les caractères physionomiques et écologiques de ces végétaux. Lorentz (1860) reconnaissait des espèces aquatiques et des espèces terrestres (argileuses, humicoles, etc.) et un groupe spécial, les compactae, représentant les espèces saxicoles, nivales, etc.
Giesenhagen (1910) décrivait des formes dendroïdes (Climacium), des formes pendantes (Meteorium), des formes en fronde (Hypopterygium).
H. Gams (1918, 1932) déduit les formes biologiques des Muscinées de leur écologie. Il distingue des espèces flottantes (Natantia) comme les Riccia fluitans et Drepanocladus et des espèces fixées (Adnata) vivant, par exemple, sur les rochers (Epipetria), ou submergées comme les Fontinalacées.
H. Meusel (1935), d'après le port et le mode de croissance des tiges et des rameaux, divise les Muscinées en espèces orthotropes donc dressées comme les Polytrichum et en espèces plagiotropes, c'est-à-dire couchées, comme Hylocomium splendens.
Si l'on considère l'aspect non plus d'un spécimen mais de l'ensemble des spécimens vivant en colonie, on peut alors décrire des coussins denses (Leucobryum), des coussins ras ou plus élevés (Catharinea undulata), des tapis (Thuidium), des plages couvrant les bois en décomposition (Lepidozia reptans), les branches, les feuilles des végétaux supérieurs (Lejeunéacées).
Associations muscinales
Les Bryophytes sont d'utiles indicateurs de groupements végétaux. Les associations strictement muscinales sont assez rares. Le plus souvent, des Phanérogames se mêlent aux Muscinées. Ainsi, dans une tourbière à Sphaignes où vivent aussi l'Andromède et l'Oxycoccos, les Hépatiques Mylia anomala et Cephalozia media jouent un rôle important.
Citons quelques exemples d'associations. P. Allorge a décrit, en Vexin, l'association à Riccia, Phascum, Dicranella varia qui, avec des Algues Siphonées, occupent les vases fluviatiles encore humides. P. Jovet, dans le Valois, reconnaît une association des blocs siliceux des rus intermittents où Brachythecium plumosum, Amblystegium irriguum, Grimmia apocarpa représentent des espèces caractéristiques. En Pologne, Wisniewski individualise un groupement à Anomodon viticulosus et Leucodon sciuroides sur les arbres feuillus. Hugo Osvald, étudiant en Irlande la végétation d'une tourbière caractérisée par des Phanérogames telles que Schoenus nigricans et Eriophorum vaginatum, a noté treize Sphaignes, plus de dix Hépatiques et Mousses et même des Lichens comme espèces constantes ou compagnes.
Distribution géographique
La distribution des Muscinées dans le monde dépend de leurs possibilités de dispersion par les spores et les propagules, des conditions écologiques aux différentes périodes géologiques, de l'intensité, de l'époque et du lieu de création des grands courants évolutifs qui ont permis au cours des temps la naissance et le développement des lignées passées et actuelles.
Un petit nombre d'espèces sont cosmopolites, par exemple Bryum argenteum, la funaire hygrométrique, Marchantia polymorpha. Certaines peuvent être qualifiées de pantropicales comme Rhizogonium spiniforme, Octoblepharum albidum. Un grand nombre se répartissent soit dans les régions paléotropicales soit dans les régions néotropicales. Les espèces holarctiques ou boréales, localisées dans l'hémisphère Nord, s'étendent plus ou moins largement sur l'Europe, l'Amérique du Nord, l'Asie. Les Muscinées arctiques (Fissidens arcticus, Seligeria polaris) et antarctiques (ex. : Pottia Charcoti) se localisent près des pôles. Les endémiques sont, du moins dans certaines régions, assez nombreuses.
Systématique
Classification des Bryophytes
L'embranchement des Bryophytes comprend cinq classes : classe I, Hepaticopsida ; classe II, Anthocerotopsida ; classe III, Sphagnopsida ; classe IV, Andreaeopsida ; classe V, Bryopsida. On désigne couramment par « Hépatiques » l'ensemble des classes I et II, par « Sphaignes » la classe III, par « Mousses » les classes IV et V. Le choix de ces divisions et l'ordre dans lequel elles sont présentées soulignent l'indépendance des Anthocerotopsida par rapport aux autres Hépatiques, l'importance des caractères distinctifs des Sphaignes par rapport aux Mousses, la nécessité de séparer le petit groupe des Andreaeopsida de l'énorme ensemble des Bryopsida.
À l'intérieur de chaque classe, les caractères morphologiques ne sont pas constants. Aussi a-t-on subdivisé les Hepaticopsida en deux ordres : les Marchantiales, dont l'appareil végétatif est un thalle et dont les sporophytes sont portés non par le thalle lui-même mais par des expansions particulières du thalle ; les Jungermanniales, dont le gamétophyte se présente soit comme un thalle portant des sporophytes latéraux (Jungermanniales anacrogynes), soit comme une tige feuillée à l'extrémité de laquelle se développe le sporophyte (Jungermanniales acrogynes).
Les Sphagnopsida ne comprennent actuellement qu'un seul ordre, les Sphagnales, remarquable par le tissu du gamétophyte et par la constitution du sporophyte. L'ordre des Protosphagnales a été trouvé seulement à l'état fossile.
Anthocerotopsida et Andreaeopsida ont aussi, chacun, un seul ordre.
Les Bryopsida possèdent une structure plus complexe que les autres classes, par exemple en ce qui concerne la morphologie du péristome qui ferme l'urne. On peut les diviser en une quinzaine d'ordres fondés sur le port du gamétophyte, la forme et la disposition des feuilles, la constitution de la capsule et du péristome. Ces ordres peuvent contenir un petit nombre de familles (ex. : Fissidentales, 1 famille ; Polytrichales, 1 famille) mais, parfois, un plus grand nombre (16 familles chez les Eubryales ; 21 familles chez les Isobryales).
Affinités des Bryophytes
Par leur organe reproducteur femelle, véritable archégone, les Bryophytes se placent parmi les Archégoniates. Mais, dépourvus de racines et de vascularisation, ils diffèrent nettement des plantes vasculaires.
Ils présentent quelque affinité avec les Algues, notamment par la présence de plastes chlorophylliens porteurs d'amidon, mais ce sont des végétaux plus complexes que les Algues à la fois par leur appareil végétatif, leurs anthéridies, leurs archégones et leur capsule (sporange).
Ils rappellent les Ptéridophytes, d'abord par la présence d'un archégone portant un œuf qui, n'étant jamais libéré dans l'eau, reste protégé par une enveloppe, ensuite par l'existence, dans la vie du végétal, de deux phases successives (une phase haploïde, une phase diploïde), c'est-à-dire d'une alternance de générations. Cependant, les Bryophytes ont un appareil végétatif dépourvu de vaisseaux ligneux, un gamétophyte (tige feuillée) prépondérant et, chez eux, la fécondation s'effectue sur la tige. Les Ptéridophytes, au contraire, possèdent des vaisseaux ligneux, un sporophyte prépondérant et la fécondation a lieu sur le prothalle.
Ancienneté des Bryophytes
Les Bryophytes n'existaient peut-être pas au Silurien et au Dévonien inférieur mais des fossiles, tels que Hepaticites devonicus trouvé en Amérique du Nord, nous garantissent leur existence dès le Dévonien supérieur. Au Carbonifère et surtout au Permien, ils se diversifient. Au Secondaire, on les trouve relativement abondants et dispersés. Dès le Tertiaire, beaucoup d'espèces actuelles existent déjà. Celles du Quaternaire persistent encore de nos jours.
Des groupes fort remarquables ont maintenant disparu. C'est le cas des Protosphagnales du Permien inférieur de l'Angaride : leur gamétophyte diffère de celui des Sphagnales, cependant leur tissu ressemble à celui des Sphaignes ; leur sporophyte reste, malheureusement, inconnu. Les Naiadita n'ont été trouvés que dans le Rhétien d'Angleterre : ancêtres probables de plusieurs groupes actuels (des Sphaerocarpales par exemple), ils sont formés d'une tige portant des feuilles sans nervure et insérées en spirale et d'un sporophyte comprenant une capsule portée par un pied court et contenant des spores en tétrades ornées d'épines.
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